Les conséquences du projet Darmanin
Le gouvernement a présenté le mercredi 1er février 2023 son projet de loi immigration.
Le projet de loi comporte plusieurs volets : travail, intégration, éloignement mais aussi asile et contentieux des étrangers. Le texte prévoit entre autres d'expulser davantage les étrangers qui représentent une menace grave, de réformer le système d'asile pour accélérer les procédures, mais aussi de limiter l'octroi de titres de séjour.
A fortiori, le projet semble vouloir faciliter l'éloignement des étrangers protégés, tels que les parents d'enfants français qui pourront dorénavant être expulsés plus facilement du territoire.
Concernant l'éloignement, on constate divers articles du projet qui tendent à faciliter au maximum les expulsions, d'une part pour les étrangers délinquants déjà condamnés pour des crimes et délits punis de dix ans ou plus d'emprisonnement, mais aussi lorsque l'étranger a commis des faits constituant une menace pour l'ordre public, la sécurité publique ou la sûreté de l'État. Le projet de loi assouplit donc la protection quasi absolue contre l'expulsion dont bénéficient certains étrangers condamnés présents depuis longtemps en France ou qui y ont des attaches personnelles et familiales (par exemple parent d'un enfant français ou étranger entré en France avant ses 13 ans). Le texte facilite aussi le prononcé par les juges de la peine complémentaire d'interdiction du territoire français (crime ou délit puni de plus de dix ans de prison, violences graves contre les forces de l'ordre...).
Quant aux demandeurs d'asile, eux aussi ne sont pas épargnés par la réforme, le projet prévoit d'accélérer les procédures d'asile et d'expulser plus rapidement, le projet de loi met ainsi en place le jugement à juge unique afin de diminuer les jugements en collégialité.
Pour faciliter l'éloignement ou plutôt pour accélérer les demandes, des espaces France Asile seront créés, regroupant des agents de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et des préfectures, ceci permettra d'activer le traitement des dossiers et de refuser dans un temps limité certaines demandes.
Concrètement, le ministre de l'Intérieur veut faire changer la loi pour qu'un avis négatif de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides vaille décision de retour, et ce, sans même attendre un éventuel appel devant la Cour Nationale du Droit d'Asile.
Une rationalisation et accélération de la procédure est souhaitée. En effet, des audiences délocalisées et des vidéo-audiences sont à prévoir en zone d'attente et en rétention. Ce système risque de nuire excessivement à la qualité de la justice pour les affaires impliquant des mineurs.
Bien que l'on constate quelques points favorables de cette réforme aux étrangers mineurs, notamment l'interdiction envisagée du placement en centre de rétention administrative des moins de 16 ans, permettant ainsi d'éviter le placement en rétention de centaines d'enfants, cet aspect positif reste malheureusement lui aussi à nuancer…. En l'état actuel, le texte permettra encore l'enfermement de milliers d'autres enfants en toute légalité, parce qu'ils auront plus de 16 ans, qu'ils résident à Mayotte, ou qu'ils seront privés de liberté aux frontières ou dans les locaux de rétention administrative.
En définitive, le projet Darmanin semble être globalement assez défavorable aux étrangers présents sur le territoire français mais aussi à ceux qui souhaitent obtenir une protection étatique… Cette réforme va engendrer un durcissement réel du maintien des étrangers sur le territoire.